Cahiers Lyonnais d'AnthropoBiométrique, 4, 2015 / Lyon-France ISSN 2260-0442
A propos d'un cas où reconstitution faciale et biométrique de similarité associées ont permis d'envisager une identité pour une personne restée inconnue depuis plus de 20 ans : l'affaire Agnès Le Roux
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1 - Ancien Directeur du Laboratoire / Expert Honoraire en Anthropologie d'Identification, Cour d'Appel de Lyon / Webmaster du site du Laboratoire * 2 - Contact : perrot.L2APLYON1@live.fr * : http://www.laboratoiredanthropologieanatomiqueetdepaleopathologiedelyon.fr/
Résumé : Cet article s'appuie sur une expertise
anthropologique effectuée par le Laboratoire d'Anthropologie Anatomique de Lyon
en 1990 et qui n'avait pas permis à l'époque d'identifier un individu
féminin découvert à Juan-les-Pins, dans le midi de la France. Cette jeune femme
était restée sans nom depuis. Au cours de ces 25 années l'Auteur a
été amené, en plusieurs fois, à reprendre cette expertise, à titre
personnel, en faisant appel, en particulier, à la biométrique de similarité associée
à la reconstitution faciale initiale, pour finalement émettre
l'hypothèse qu'il pourrait s'agir d'Agnès Le Roux, disparue en
octobre 1977 et dont, officiellement, le cadavre n'a toujours pas été
retrouvé! Mots-clés : jeune femme inconnue / Juan-les-Pins /expertise anthropologique / reconstitution faciale / biometrique de similarité / vestiges / Agnès Le Roux Abstract : In connection with a case where facial construction and biometric of similarity associated have made possible to consider an identity for a person remained unknown for more than 20 years : the Agnes Le Roux murder This article is based
on an anthropological expertise carried out by the Anatomical Laboratory of
Anthropology of Lyon in 1990 and which had not at the time made it possible to
identify a female individual discovered near Juan-les-Pins, in the South of France.
This young woman had remained without name since. During these 25 years the
Author was brought, in several times, to take again this expertise, for its own account, by appealing, in particular, with biometric of similarity
associated with the initial facial construction, for finally putting
forth the assumption that it could be Agnes Le Roux, disappeared in October
1977 and of which, officially, the corpse was still not found! Key-words : not identified young woman / Juan-les Pins / anthropological expertise / facial construction / biometrics of similarity /remains / Agnes Le Roux 1 - Introduction En 1990 la gendarmerie d’Aix-en-Provence
contactait le
Laboratoire d'Anthropologie Anatomique de Lyon, pour une expertise judiciaire concernant un cadavre féminin, réduit
à l’état squelettique, découvert à Juan-les-Pins, par des employés de Les années qui suivirent, les médias relancaient périodiquement l'affaire de l'héritière du Palais de la Méditerranée à Nice, la jeune Agnès Le Roux disparue en octobre 1977 et dont, officiellement, en 2015, le cadavre n'a toujours pas été retrouvé (cf. note)! De là est née l'hypothèse suivante, présentée aujourd'hui : « et si l' inconnue de Juan-les-Pins expertisée sans succés en 1990 n’était autre qu’Agnès Le Roux ?!».
2 - Matériel
Le travail présenté aujourd'hui est basé sur :
3 - Méthode 3-1- Comparaison morphologique Elle fait appel à la photographie couleur de la reconstitution faciale (RF / fig.1) et à la photographie 1 couleur d'Agnès LE Roux (fig.2) Les reconstitutions faciales du Laboratoire d'Anthropologie n’avaient pas à l’époque la qualité à laquelle elles sont arrivées dix ans plus tard (cf. l'Affaire Claude F./1999) mais certains détails anatomiques ( rappellons qu’ils sont déterminés à partir d’une « lecture » attentive des reliefs osseux) sont particulièrement intéressants à prendre en compte, dans cette comparaison :
3.2.1 - Généralités Elle fait appel à la méthodologie développée dans le cadre du Laboratoire et dite "Biométrique de Similarité" qui consiste à comparer deux à deux des photographies des visages A (inconnu) et B (connu) : le but étant de déterminer si le visage A est B. Sur chaque cliché est établi un descripteur local correspondant à une signature invariante utilisant des points anatomiques qui reliés entre - eux fournissent des paramètres et des valeurs angulaires. Il est important de noter que n’est jamais prise en compte la comparaison des valeurs brutes d’un même paramètre sur les deux clichés mais celle des invariants géométriques [rapports indiciaires confrontant les paramètres deux à deux (formule générale d’un indice : paramètre 1 x 100 / paramètre 2) , valeursangulaires) ce qui offre l’avantage considérable de pouvoir travailler sur des instantanés n’étant pas à la même échelle [2-3-4]! La ressemblance (ou similarité) entre A et B va
être établie en prenant en compte la différence algébrique des valeurs
indiciaires ( ou angulaires), selon la modalité suivante :
Ensuite la somme algébrique de l’ensemble des intervalles indiciaires et angulaires est calculée puis divisée par le nombre (N) d’indices et de valeurs angulaires pris en compte : le résultat ainsi obtenu (qui est donc une moyenne algébrique) représente le score de similarité qui varie de 0 à 10. A chaque score est attribué un % d’assimilation ( = ressemblance) des deux visages (tableau 1) : Tableau 1- Score de similarité et % d'assimilation pris en compte dans la comparaison
Il est
bon de noter que la comparaison prend en compte également des caractères morphologiques,
qui, bien que non quantifiables, vont apporter un complément d'information non
négligeable (§ 3.1). 3.2.2 - Points faciométriques, angles, paramètres et indices retenus Sur un plan pratique le crâne inconnu (fig.3 : taille 248 x 300 pixels / à noter que les mesures ont été établies sur un dessin agrandi à 497 x 600 pixels) a donc été comparé avec
Le dessin du crâne (en norma facialis) précéde obligatoirement la reconstitution faciale. Il permet en particulier de positionner les globes oculaires dans les orbites (évidemment vides) selon les travaux de Guerassimov repris dans notre méthode de reconstitution faciale, la méthode DMP [1]. En tout premier lieu on retiendra l'emplacement des deux pupilles (A et B) auquel vont être reliés les 12 autres points retenus. Ces 14 points sont disposés pareillement sur les deux photographies. Ces 14 points faciométriques vont déterminer 19 paramètres (tableau 2) , 9 valeurs angulaires et 14 valeurs indiciaires (tableau 3).
4 - Résultats Trois comparaisons ont donc été effectuées (tableau 3) :
La similitude photographie / crâne est de :
5 - Discussion / Conclusion En 1990, le fait que nous n'ayons pas pu identifier l'inconnue de Juan-Les-Pins avait été pour nous ressenti comme un échec : cette expertise demeurait donc inachevée! Cette insatisfaction nous a poursuivi pendant toutes ces années et justifie notre recherche de la vérité longtemps après l'expertise initiale! De l'étude présentée aujourd'hui on retiendra les deux éléments fondamentaux qui, à eux seuls peuvent justifier cette publication et le résultat proposé : Partant de ces résultats il semble donc logique d'admettre que l'hypothèse initiale est vérifiée et que l’inconnue de Juan-les-Pins pourrait bien avoir été Agnès Le Roux! Il nous faut, cependant, nuancer cette conclusion du fait que la reconstitution faciale utilisée dans la comparaison avec le visage, est totalement immatérielle, réduite à un dessin du crâne et à une photographie du visage : en effet malgré de nombreuses demandes, nous n'avons malheureusement pas pu retrouver la reconstitution faciale (rappelons qu'elle contenait le crâne car à l'époque, le visage était modelé directement dessus). L'impossibilité d'avoir accès à elle est dommageable en nous empêchant de revoir la reconstitution avec nos critères actuels! Il faut noter également qu'à notre connaissance, aucune recherche comparative d'ADN n'a été effectuée sur les vestiges squelettiques et sur les parents de la disparue! Ces examens complémentaires ( que nous souhaitons pouvoir un jour enfin réaliser) permettraient, objectivement, de conforter notre résultat ou, au contraire, de le réfuter!
Nous n'avons pas jugé utile d'intégrer dans la bibliographie les très nombreux articles de presse, qu'elle soit papier ou numérique : en effet il suffira au lecteur intéressé de taper le nom de la disparue dans Google pour compulser l'énorme documentation concernant l'Affaire! 7 -Bibliographie : [1] Desbois C., Perrot R. & Mallet C.,1992. La méthode D.M.P. de reconstitution faciale dans l'identification médico-légale. Paléobios, 8, 1-2, 1-21. [2]
Desbois Y. & Perrot R., 2008.
Une méthode de vidéo-photo comparaison développée
au laboratoire d'Anthropologie Anatomique de Lyon1 et appliquée à
l'identification des auteurs de vol à main armée. A propos d'un cas. [3]
Perrot R, 1996. Use of
anthropological methods in the identification of unknown individuals.14 th Meeting of the International
Association of Forensic Sciences, Tokyo, Japan [4] Perrot R., 2012. L'identification faciale du vivant. Cahiers Lyonnais d'AnthropoBiométrique / Lyon-France ISSN 2260-0442 .
Cahiers Lyonnais d'AnthropoBiométrique, 4, 2015 / Lyon-France ISSN 2260-0442 / A propos d'un cas où reconstitution faciale et biométrique de similarité associées ont permis d'envisager une identité pour une personne restée inconnue depuis plus de 20 ans (Raoul Perrot)
Mise en ligne : 03/11/2015 / page révisée le 06/02/2106
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